I
Qu'est-ce qui blesse ou adoucit,
Utile au mal comme à l'amour ;
Qui aveugle ou qui obscurcit,
Tantôt agile et tantôt gourd ?

II
Fruit de détresse ou de gaieté,
Le dire: impossibilité.
Trouble de l'oreille, acouphène ;
Et pourtant kôhl des phénomènes.

III
Voile et gardien de vérité
Qui la soustrait, qui la façonne,
Qui la dompte telle une oursonne
Câline ou rude à volonté.

IV
Je suis la vertu méconnue
Que certains font vice du diable ;
Je suis remède à l'ineffable,
Vie d'invention continue !

Lointaine et proche de ton coeur
Je n'offre ma disparition
Qu'à qui sait vouloir le bonheur
Et se fie encore aux fictions

“Le faux choix dans l'abondance spectaculaire, choix qui réside dans la juxtaposition de spectacles concurrentiels et solidaires comme dans la juxtaposition des rôles (principalement signifiés et portés par des objets) qui sont à la fois exclusifs et imbriqués, se développe en lutte de qualités fantomatiques destinées à passionner l'adhésion à la trivialité quantitative. Ainsi renaissent de fausses oppositions archaïques, des régionalismes ou des racismes chargés de transfigurer en supériorité ontologique fantastique la vulgarité des places hiérarchiques dans la consommation. Ainsi se recompose l'interminable série des affrontements dérisoires mobilisant un intérêt sous-ludique, du sport de compétition aux élections.”

Guy Debord, La Société du Spectacle ([1967] 1992), thèse n°62

Dans une vitrine que je connais, comme, je suppose, dans beaucoup d'autres, existe un livre pour enfant intitulé “Le mystère des papas”. Évidemment, les deux finales ne sont pas à leur place ; il suffirait pourtant de les déplacer d'un seul cran pour que se mettre à écrire devienne possible ; qu'elles occupent une position très légèrement différente pour que naisse à nouveau l'envie d'être lecteur. Sans doute, “Les mystères de papa” eût été meilleur. “Les mystères de papa” nous eût peut-être fait sourire, ou affligé, ou encore, le cas échéant, repoussé, mais “Les mystères de papa” ne nous eût jamais laissé indifférent.

Sûr indice que le temps passe
Que la vie brûle et s'éparpille
Mon corps distille une mélasse
Pour peu que ma tête grésille

Pelage tigré d'éphémère
Derme semé d'éternité
De tes songes je suis la mère
Du renouveau la déité

Fine pellicule glissée
Entre la surface et le geste
Accessoire d'ipséité
Indispensable à la beauté :
Je te remets à mes doigts lestes.
Liquéfie-toi, préserve
Ma peau de neige dans le grand four !
Meurs et renais trois fois par jour
Sur mon corps offert sans réserve !

Revenir au musée ; emprunter le chemin de l'exposition à contresens, en revenant sur ses pas, lire la chronologie à la fin ; le musée pour les muséastes ; imaginer telle statue ou tel tableau ou telle installation dans son salon ; etc

Un supermarché géant au bord d'une autoroute dans une région touristique ; un jetski ; le pilote du petit avion qui longe les plages ;

Et beaucoup d'autres choses…

J'effleure les jambes des baigneurs
Je provoque l'incendie
Je flotte au petit bonheur
Je répands la frénésie

Je porte un noir plus noir que le noir des bas-fonds
Je suis maîtresse des sécrétions
Je confonds l'ennemi dans la nuit du néant
J'ai le corps translucide et un os blanc